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Infraction 271 : Agression sexuelle

Note[1]

Note[2]

Note[3]

 

(Art. 271)

(dernière mise à jour – mai 2019)

[1]               (NDA) est accusé d’agression sexuelle. L’acte d’accusation se lit comme suit :

(Lire l’acte d’accusation ou le chef d’accusation.)

[2]               Vous devez déclarer (NDA) non coupable d’agression sexuelle à moins que la Couronne ait prouvé hors de tout doute raisonnable que (NDA) est la personne qui a commis l’infraction à la date et au lieu indiqués dans l’acte d’accusation[4] . De plus, la Couronne doit prouver chacun des éléments essentiels suivants hors de tout doute raisonnable :

1.    (NDA) a touché (NDP), directement ou indirectement;
2.    (NDA) a touché (NDP) de manière intentionnelle;
3.    (NDA) a touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle;
4.    (NDP) ne consentait[5] pas à l’activité sexuelle en question;
5.    (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question.

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que la Couronne a prouvé tous les éléments essentiels de l’infraction, vous devez déclarer (NDA) non coupable d’agression sexuelle.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que la Couronne a prouvé tous les éléments essentiels de l’infraction [et que vous n’entretenez pas de doute raisonnable[6] après avoir examiné le ou les moyens de défense (préciser) sur lesquels je vous donnerai des directives], vous devez déclarer (NDA) coupable d’agression sexuelle.

[3]               Je veux maintenant vous rappeler qu’il ne faut pas aborder la preuve avec des présomptions injustifiées sur ce qu’est ou n’est pas une agression sexuelle, sur ce qui constitue ou ne constitue pas un consentement, sur quel genre de personne porte ou ne porte pas plainte pour agression sexuelle, sur quel genre de personne commet ou ne commet pas une agression sexuelle ou sur ce qu’une personne qui est ou a été agressée sexuellement dit ou fait ou ne dit pas ou ne fait pas. Il n’y a pas de victime typique ou d’agresseur typique ou de situation typique ou de réaction typique. Je ne vous dis pas cela pour soutenir une conclusion donnée, mais pour vous vous mettre en garde contre la possibilité d’arriver à une conclusion fondée sur des préjugés répandus.

Lorsque (le) la plaignant(e) (ou (le) la défunt(e)) est une personne autochtone, en particulier une femme ou une fille, une directive supplémentaire portant sur les mythes, les stéréotypes et les préjugés précis dont les Autochtones sont l’objet doit être donnée en conformité R. c. Barton, 2019 CSC 33, par. 200-201. Lorsque (le) la plaignant(e) ou (le) la défunt(e) est également un(e) travailleur (travailleuse) du sexe, une directive spécifique conforme au paragraphe 201 doit également être donnée. Cependant, cette directive ne doit pas privilégier les droits du (de la) plaignant(e) au détriment de ceux de l’accusé(e) (R. c. Barton, 2019 CSC 33, au par 203). Les paragraphes pertinents énoncent ce qui suit :

 [200]                      Dans cette optique, j’estime que notre système de justice pénale et tous ceux qui y participent doivent prendre des mesures raisonnables pour s’attaquer de front aux partis pris, aux préjugés et aux stéréotypes systémiques dont sont victimes les Autochtones — et plus particulièrement les femmes et les travailleuses du sexe autochtones. Fermer les yeux sur ces partis pris, préjugés et stéréotypes n’est pas la solution. Par conséquent, en vue de fournir une garantie supplémentaire à l’avenir dans les affaires d’agression sexuelle la plaignante est une femme ou une fille autochtone, les juges de première instance seraient bien avisés de donner une directive expresse visant à contrecarrer les préjugés contre les femmes et les filles autochtones. Cette directive devrait aller plus loin qu’une directive générale demandant aux jurés de raisonner d’une manière impartiale et sans sympathie ni préjugé.

[201]                      Quant au contenu de cette directive, il n’y a pas de formule magique. À mon avis, le juge du procès devrait avoir le pouvoir discrétionnaire d’adapter la directive aux circonstances propres à l’espèce, de préférence après avoir consulté le ministère public et la défense. Dans un cas comme celui qui nous occupe, le juge du procès pourrait songer à expliquer au jury que les Autochtones au Canada — et plus particulièrement les femmes et les filles autochtonesont subi une longue période de colonisation et un racisme systémique dont les effets se font encore sentir. Le juge du procès pourrait également dissiper un certain nombre de suppositions stéréotypées troublantes concernant les femmes autochtones qui travaillent dans l’industrie du sexe, notamment celles selon lesquelles ces personnes :

       •        n’ont pas droit aux mêmes protections que celles qu’offre le système de justice pénale aux autres Canadiens;

       •        ne méritent pas d’être traitées avec respect, humanité et dignité;

       •        sont des objets sexuels destinés à procurer du plaisir aux hommes;

       •        n’ont pas besoin de donner leur consentement à l’activité sexuelle et que [traduction] « l’on a qu’à les prendre »;

       •        acceptent le risque qu’il puisse leur arriver quelque chose de mal parce qu’elles font un travail dangereux;

       •        sont moins crédibles que d’autres personnes.

[203]                      En ce qui concerne l’équité du procès, il convient de souligner que toute directive donnée ne doit pas privilégier les droits de la plaignante au détriment de ceux de l’accusé. L’objectif consiste plutôt à relever les partis pris, les préjugés et les stéréotypes précis auxquels on peut raisonnablement s’attendre dans une affaire donnée et de tenter de les évacuer du processus de délibération des jurés d’une manière équitable et équilibrée, et sans porter préjudice à l’accusé.

Vous devez examiner la preuve avec un esprit ouvert et sans idées préconçues. Vous devez rendre une décision fondée exclusivement sur la preuve, en conformité avec mes directives sur le droit applicable.

[4]               Pour établir si la Couronne a prouvé les éléments essentiels de l’infraction, examinez les questions suivantes :

[5]               Première question : (NDA) a-t-il touché (NDP), directement ou indirectement ?

On entend par « toucher » tout contact physique avec une autre personne. Le contact peut être direct, comme c’est le cas lorsqu’on touche une personne avec la main ou une autre partie du corps, ou indirect, comme c’est le cas lorsqu’on touche une personne avec un objet. Donc, chaque fois que je fais référence au fait de toucher, je veux dire tout contact physique.

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP), vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP), vous devez passer à la prochaine question.

[6]               Deuxième question : (NDA) a-t-il touché (NDP) de manière intentionnelle ?

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) avait l’intention de toucher (NDP).

Le contact doit être intentionnel, par opposition à accidentel. Pour décider si (NDA) a touché (NDP) de manière intentionnelle, vous devez examiner tous les éléments de preuve, y compris toute parole prononcée ou tout geste posé dans les circonstances.

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP) de manière intentionnelle, vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP) de manière intentionnelle, vous devez passer à la prochaine question.

[7]               Troisième question : (NDA) a-t-il touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle ?

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle et que l’intégrité sexuelle de (NDP) s’en est trouvée atteinte.

Pour répondre à cette question, vous devez vous demander si la nature sexuelle du contact serait évidente pour un observateur raisonnable.

Afin de décider si le contact physique a eu lieu dans des circonstances de nature sexuelle et que l’intégrité sexuelle de (NDP) s’en est trouvée atteinte, vous devez examiner tous les éléments de preuve. Par exemple, prenez en considération la partie du corps que (NDA) a touchée, la nature du contact et la situation dans laquelle le contact a eu lieu. Tenez compte des paroles ou des gestes qui ont accompagné le contact, et de toutes les autres circonstances. Le but[7] dans lequel (NDA) a touché (NDP) peut aussi vous aider à décider si le contact physique était de nature sexuelle.

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle, vous devez déclarer (NDA) non coupable.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) a touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle, vous devez passer à la prochaine question.

[8]               Quatrième question : (NDP) consentait-il (elle) à l’activité sexuelle en question?[8]

Lorsque se pose la question de savoir si la force, des menaces, la peur, la fraude ou l’abus de pouvoir[9] ont vicié le consentement, la directive relative au consentement doit être présentée en deux parties, conformément à R. c. Hutchinson, 2014 CSC 19.

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDP) n’a pas consenti à l’activité sexuelle en question.

Le consentement signifie l’accord volontaire du (de la) plaignant(e) à l’activité sexuelle en question[10] . Le consentement doit avoir été donné à l’égard de chacun des actes qui ont eu lieu. Un(e) plaignant(e) n’a pas l’obligation d’exprimer son absence de consentement, par des paroles ou son comportement.

Il n’y a pas de consentement à moins que (NDP) ait, dans son esprit, accepté l’activité sexuelle au moment où celle-ci se produisait[11] .

Notez bien que le consentement à une forme d’activité sexuelle ne vaut pas consentement à toutes les formes d’activité sexuelle. Par exemple, le consentement à l’emploi d’une certaine force ne vaut pas consentement à l’emploi d’une force plus grande; le fait de consentir à être touché sur une partie du corps ne vaut pas consentement à être touché sur d’autres parties du corps; le consentement à une forme de contact ne vaut pas consentement à toute forme de contact. De plus, une personne peut révoquer son consentement ou en limiter la portée à tout moment.

Le silence ne vaut pas consentement, pas plus que la soumission ou le fait de ne pas résister.

Pour que le consentement soit valide, le (la) plaignant(e) doit être conscient(e) et capable de donner son consentement pendant toute la durée de l’activité.[12]

S’il y a lieu, ajouter ce qui suit :

On ne peut inférer le consentement uniquement de la relation qui existe entre la personne qui est accusée et celle qui a porté plainte.

 

S’il y a lieu, ajouter ce qui suit :

On ne peut inférer le consentement de l’habillement du plaignant ou de la plaignante.

Vous avez entendu une preuve selon laquelle (NDP) n’a pas consenti à l’activité sexuelle en question. Il vous revient de décider si cette preuve vous convainc hors de tout doute raisonnable que (NDP) n’y a pas consenti. Examinez tous les éléments de preuve, y compris les circonstances entourant le contact physique entre (NDA) et (NDP), afin de décider si (NDP) n’y a pas consenti. Tenez compte de toute parole prononcée ou de tout geste posé, y compris une preuve de comportement ambigu ou contradictoire, et de tout autre signe indiquant l’état d’esprit de (NDP) à ce moment-là.[13]

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDP) n’a pas consenti à l’activité sexuelle en question, vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDP) n’a pas consenti à l’activité sexuelle, vous devez passer à la prochaine question.

[9]               Cinquième question : Est-ce que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question?[14]

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question.

Pour prouver que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas, la Couronne doit prouver l’une des situations suivantes[15]  :

1.  que (NDA) savait vraiment que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question; ou

2. que (NDA) savait qu’il existait un risque que (NDP) ne consente pas à l’activité sexuelle en question et que (NDA) ne s’en est pas soucié; ou

3. que (NDA) avait connaissance de signes indiquant que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question, mais qu’il (ou elle) a délibérément choisi de les ignorer parce que (NDA) ne voulait pas connaître la vérité.

La preuve de l’une de ces situations suffit à démontrer que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas au contact physique. Vous n’avez pas à tous vous mettre d’accord sur la même situation. Si chacun d’entre vous est convaincu hors de tout doute raisonnable de l’une des situations ci-dessus, la Couronne aura prouvé l’élément essentiel de connaissance.

Si la défense de croyance sincère mais erronée au consentement communiqué[16] est vraisemblable, ajouter la directive suivante :

(NDA) affirme qu’il ne savait pas que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question. De fait, (NDA) affirme qu’il (elle) croyait sincèrement que (NDP) avait communiqué son consentement à l’activité sexuelle en question.

Une croyance est un état d’esprit, en l’occurrence, l’état d’esprit de (NDA). Demandez-vous si (NDA) croyait sincèrement que (NDP) avait vraiment dit oui, par ses paroles ou par son comportement.

Le fait que la personne accusée ait cru que le (la) plaignant(e), dans son esprit, voulait qu’il (elle) le touche mais n’a pas manifesté ce désir, ne constitue pas une défense. Les suppositions de la personne accusée relativement à ce qui se passait dans l’esprit du(de la) plaignant(e) ne constituent pas un moyen de défense.

En vertu de notre droit, (NDA) ne pouvait croire sincèrement que (NDP) avait communiqué son consentement au contact physique que si (NDA) a pris des mesures raisonnables dans les circonstances dont il (elle) avait alors connaissance pour s’assurer de ce consentement.[17] Afin de décider si (NDA) a pris des mesures raisonnables, déterminez d’abord quelles étaient les circonstances connues de (NDA). Demandez-vous ensuite si une personne raisonnable ayant cette connaissance aurait fait autre chose pour s’assurer du consentement de (NDP). Si la réponse est oui, demandez-vous si (NDA) a fait autre chose pour s’assurer du consentement. Si (NDA) n’a rien fait d’autre pour s’assurer du consentement, il (elle) ne peut affirmer qu’il (elle) croyait sincèrement que (NDP) avait communiqué son consentement à l’activité sexuelle en question.

Si vous concluez qu’une personne raisonnable n’aurait pas fait autre chose dans les circonstances dont (NDA) avait alors connaissance pour s’assurer du consentement de (NDP), (NDA) peut affirmer qu’il (elle) croyait sincèrement que (NDP) avait communiqué son consentement. Ce qu’une personne raisonnable ferait dépend entièrement des circonstances de l’affaire.

Même si vous arrivez à la conclusion que (NDA) a pris des mesures raisonnables, vous devez examiner la question de savoir si (NDA) croyait sincèrement que (NDP) communiquait son consentement à l’activité sexuelle en question.

Pour décider si (NDA) croyait sincèrement que (NDP) communiquait son consentement à l’activité sexuelle en question, vous devez examiner toutes les circonstances qui l’ont entourée. Tenez compte de toute parole prononcée ou de tout geste posé, par (NDA) ou (NDP), et de tout autre signe indiquant l’état d’esprit de (NDA) à ce moment-.

(NDA) devait croire sincèrement que (NDP) communiquait son consentement à l’activité sexuelle en question. Une croyance sincère ne peut être fondée sur l’intoxication volontaire de (NDA). Il ne peut non plus y avoir de croyance sincère si (NDA) voyait qu’il existait un risque que (NDP) ne consente pas au contact physique et qu’il (elle) ne s’en est pas soucié(e). De même, il ne peut y avoir de croyance sincère si (NDA) avait connaissance de signes indiquant que (NDP) ne consentait pas et que (NDA) a délibérément choisi de les ignorer parce que (NDA) ne voulait pas connaître la vérité.[18]

De plus, il ne peut y avoir de croyance sincère au consentement communiqué en l’absence de preuve montrant que (NDP) a explicitement manifesté son accord volontaire à l’activité par ses paroles ou son comportement.[19]

La croyance de (NDA) doit être sincère, mais elle n’a pas à être raisonnable. Cependant, la présence ou l’absence de motifs raisonnables peut vous aider à décider si la croyance de (NDA) était sincère. Considérez toutes les circonstances de l’affaire pour décider de cette question. Vous devez examiner tous les éléments de preuve, y compris toute parole prononcée ou tout geste posé dans les circonstances.

(NDA) n’a pas à prouver qu’il croyait sincèrement que (NDP) communiquait son consentement au contact physique. Au contraire, il appartient à la Couronne de prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) ne croyait pas sincèrement au consentement de (NDP).

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

Note au juge du procès sur les « mesures raisonnables » :

Dans R. c. Barton, 2019 CSC 33, la Cour a déclaré qu’il faut donner des directives au jury sur ce qui peut ou ne peut pas être considéré comme une mesure raisonnable. Vous devez inclure dans l’examen de la preuve pertinente ce qui, selon vos conclusions, ressort comme une mesure raisonnable sur le fondement de l’examen de la vraisemblance de la croyance, de même que préciser les éléments de preuve qui ne peuvent constituer une mesure raisonnable, selon les par. 106 à 109[20] de R. c. Barton.

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas (ou, que (NDA) ne croyait pas sincèrement que (NDP) consentait)[21] à l’activité sexuelle en question, vous devez déclarer (NDA) non coupable.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait que (NDP) ne consentait pas (ou, que (NDA) ne croyait pas sincèrement que (NDP) consentait)[22] à l’activité sexuelle en question, vous devez déclarer (NDA) coupable.

Vous ne devez pas déclarer (NDA) coupable d’agression sexuelle, à moins que vous ne soyez convaincus hors de tout doute raisonnable :

1. que (NDA) a touché (NDP) directement ou indirectement; et

2. que (NDA) a touché (NDP) de manière intentionnelle; et

3. que (NDA) a touché (NDP) dans des circonstances de nature sexuelle; et

4. que (NDP) ne consentait pas à l’activité sexuelle en question; et

5. que (NDA) savait, selon la définition que j’ai donnée précédemment de la connaissance, que (NDP) ne consentait pas (ou, que (NDA) ne croyait pas sincèrement que (NDP) communiquait son consentement)[23] à l’activité sexuelle en question.

Si l’un de ces éléments essentiels n’a pas été prouvé hors de tout doute raisonnable [ou si vous entretenez un doute raisonnable à l’égard de (préciser le moyen de défense)], vous devez déclarer (NDA) non coupable.

Si vous êtes convaincus que les cinq éléments essentiels ont été prouvés hors de tout doute raisonnable, vous devez pas déclarer (NDA) coupable d’agression sexuelle[24] .

[1] La présente directive couvre seulement les paragraphes 265(1)(a) et (2) du Code criminel, à savoir une agression sexuelle avec contact. Ces directives devront être modifiées si l’infraction alléguée correspond au libellé des paragraphes 265(1)(b) ou (c).

[2] Les infractions sexuelles prévues au Code criminel ont été profondément remaniées en 1983 et en 1992. Les directives doivent être conformes au droit qui était en vigueur au moment de l’infraction reprochée. Par exemple, les infractions de viol et d’attentat à la pudeur ont été abrogées en 1983.

[3] Cette directive utilise les termes « contact » et « toucher » plutôt que « force » par souci d’uniformité avec le libellé des articles 151 à 153 du Code criminel. Le choix de ces termes permet également d’éviter d’éventuels verdicts contradictoires : voir R. v. Tremblay, 2016 ABCA 30, 334 CC (3d) 520; R. v. S.L., 2013 ONCA 176; et R. v. Tyler, 2015 ONCA 599.

[4] Si l’identité est contestée, ne pas oublier d’inclure toute autre directive pertinente (ex., témoin oculaire, alibi, faits similaires, etc.). Si la date est contestée, le jury doit être informé que la Couronne doit prouver que l’infraction a été commise au cours de la période indiquée dans l’acte d’accusation. Si le lieu est contesté, le jury doit être informé que la Couronne doit prouver que l’infraction a été commise en partie au lieu indiqué dans l’acte d’accusation.

En règle générale, la Couronne doit prouver la date et le lieu indiqués dans l’acte d’accusation. Cependant, lorsqu’il y a divergence entre les éléments de preuve et l’acte d’accusation, se reporter à l’alinéa 601(4.1) du Code criminel et à la jurisprudence qui a suivi R. c. B.(G.), [1990] 2 R.C.S. 3.

[5] Le consentement n’est pas un moyen de défense si le plaignant ou la plaignante est âgé(e) de moins de 16 ans. Il existe des exceptions à cette règle, qui sont exposées à l’article 150.1 du Code criminel.

[6] Insérer l’énoncé entre crochets s’il y a lieu. Cette directive devra être modifiée si le fardeau légal de preuve incombe à l’accusé, par exemple en matière de troubles mentaux ou d’automatisme.

[7] Dans certains cas, il pourrait convenir d’informer le jury qu’il peut déclarer l’accusé coupable d’agression sexuelle même si son but n’était pas lié à une forme de gratification sexuelle. Voir R. c. (K.B.), [1993] 2 RCS 857, R. c. Chase, [1987] 2 RCS 293.

[8] Voir les art. 273.1 et 265(3) du Code criminel. Il y a lieu de noter que le paragraphe 273.1(1.2) du Code prévoit que la question de savoir s’il n’y a pas de consentement est une question de droit. La présente directive suppose que l’objet de cette disposition est simplement de clarifier les droits d’appel du ministère public, et non pas de soustraire la question du consentement à l’examen du jury.

[9] Paragraphe 273.1(1)(c).

[10] Si la preuve indique que le (la) plaignant(e) a consenti au contact, mais non pas à la nature sexuelle de celui-ci, ou se méprenait sur l’identité du partenaire, informer le jury que ces questions doivent servir à déterminer si le (la) plaignant(e) a donné son accord volontaire à l’activité sexuelle en question. Voir R. c. Hutchinson, 2014 CSC 19. Par exemple, consentir à un examen médical n’équivaut pas à consentir à une activité sexuelle.

[11] Paragraphe 273.1(1.1).

[12] Paragraphes 273.1(2)(a.1), (b), et 273.1(3). Les formes d’incapacité au consentement ne sont pas limitées. Ainsi, l’incapacité peut découler d’une intoxication par l’alcool ou des stupéfiants, ou encore d’une incapacité mentale. Si cette question est soulevée par la preuve, d’autres directives seront nécessaires. On consultera, à titre indicatif, les décisions suivantes : R. c. M.A.P., [2004] N.S.J. no. 55 (C.A.), 2004 NSCA 27, au par. 15; R. v. Al-Rawi, 2018 NSCA 10; et R. c. Siddiqui, 2004 BCSC 1717.

[13] Voir : R. c. Ewanchuck, [1999] 1 R.C.S. 330, au par. 61.

[14] Selon une interprétation de R. c. Ewanchuck, [1999] 1 R.C.S. 330, la connaissance de l’accusé (ou son insouciance ou son aveuglement volontaire) quant à l’absence de consentement est un des éléments de la mens rea que la Couronne doit prouver dans toute affaire d’agression sexuelle. Voir aussi R. c. J.A., 2011 RCS 28, au par. 24. Il s’agit de l’interprétation reflétée dans la présente directive. Cependant, selon une autre interprétation possible de Ewanchuk, soulevée en tant que question dans R. c. Barton, 2017 ABCA 216, au par. 239, voir également R. c. Barton, 2019 CSC 33, l’intention de toucher est la seule exigence de mens rea, sauf dans les cas où la défense de croyance sincère au consentement apparaît vraisemblable, auquel cas la connaissance devient un élément de la mens rea. Autrement, selon l’argument avancé, la Couronne aurait le fardeau de réfuter la croyance sincère au consentement même si cette question n’est pas en litige (soit parce que la question n’a pas été soulevée, soit parce que le critère de la vraisemblance n’est pas rempli). Voir également la directive fondée sur la deuxième interprétation qui est proposée à la note 105 de la décision de la Cour d’appel de l’Alberta dans l’affaire Barton : « If you are satisfied that the Crown has proven beyond a reasonable doubt that the complainant did not consent to the sexual activity, you should have little difficulty in concluding that the accused knew or was willfully blind to the fact that the complainant was not consenting to the sexual activity in question or was reckless and chose to take the risk. »

[15] Voir R. c. J.A., 2011 CSC 28, au par. 24; R. c. Ewanchuck, [1999] 1 R.C.S. 330, au par. 42; et R. c. Barton, 2019 CSC 33, au par. 87.

[16] Dans R. c. Barton, 2019 CSC 33, au paragraphe 92, la Cour a déclaré qu’il faudrait appeler ce moyen de défense la « croyance sincère mais erronée au consentement communiqué », plutôt que « croyance sincère mais erronée au consentement ».

[17] Paragraphe 273.2(b).

[18] Paragraphe 273.2(a).

[19] Paragraphe 273.2(c).

[20] R. c. Barton, 2019 CSC 33, au par. 106 à 109 :

[106]                      Sans oublier que le « consentement » est défini au par. 273.1(1) du Code comme « l’accord volontaire du plaignant à l’activité sexuelle », qu’est ce qui peut constituer des mesures raisonnables pour s’assurer du consentement? À mon avis, l’analyse relative aux mesures raisonnables repose grandement sur les faits. Il ne serait donc guère judicieux et utile d’essayer de dresser une liste exhaustive des mesures raisonnables ou d’occulter les termes de la loi en les complétant ou en les reformulant.

[107]                      Cela dit, il est possible de cerner certains éléments qui ne sont manifestement pas des mesures raisonnables. Par exemple, les mesures qui reposent sur les mythes liés au viol ou sur les présomptions stéréotypées au sujet des femmes et du consentement n’ont aucunement un caractère raisonnable. Ainsi, l’accusé ne saurait prétendre que le fait de se fier au silence, à la passivité ou au comportement ambigu de la plaignante est une mesure raisonnable pour s’assurer du consentement, car le fait de croire que l’un ou l’autre de ces facteurs emporte consentement constitue une erreur de droit (voir Ewanchuk, par. 51, citant M. (M.L.)). Dans le même ordre d’idées, il serait pour le moins abusif de penser qu’une agression sexuelle puisse constituer une mesure raisonnable (voir Sheehy, p. 518). Par conséquent, la tentative de l’accusé de [traduction] « tâter le terrain » en se livrant sciemment ou inconsidérément à des attouchements sexuels non consensuels ne saurait être considérée comme une mesure raisonnable. Il s’agit d’un enjeu particulièrement critique dans le cas où le plaignant est inconscient ou semi conscient (voir Sheehy, p. 537).

[108]                      Il est également possible de préciser dans quelles circonstances le critère à remplir pour satisfaire à l’obligation relative aux mesures raisonnables sera plus exigeant. Par exemple, plus l’activité sexuelle est envahissante ou plus le risque pour la santé et la sécurité des participants est élevé, le bon sens veut qu’une personne raisonnable fasse preuve d’une grande prudence pour s’assurer du consentement. Il en va de même si l’accusé et le plaignant se connaissent peu, aggravant ainsi le risque de malentendus et d’erreurs. En définitive, l’analyse relative aux mesures raisonnables demeure largement tributaire du contexte et ses exigences varient d’un cas à l’autre.

[109]                      Dans l’ensemble, le juge du procès et le jury devraient aborder l’analyse relative aux mesures raisonnables en se concentrant sur l’objet et en n’oubliant pas que l’obligation relative aux mesures raisonnables confirme que l’accusé ne saurait assimiler le silence, la passivité et le comportement ambigu à la communication du consentement. De plus, le juge du procès et le jury devraient se laisser guider par le besoin de protéger l’intégrité physique d’une personne, son autonomie sexuelle et sa dignité humaine. Enfin, si l’on veut que l’obligation relative aux mesures raisonnables ait un effet concret, il faut l’appliquer avec soin. Une analyse effectuée pour la forme n’est pas acceptable.

[21] Inclure l’énoncé entre parenthèses si le jury a reçu des directives sur la croyance erronée au consentement.

[22] Inclure l’énoncé entre parenthèses si le jury a reçu des directives sur la croyance erronée au consentement.

[23] Inclure l’énoncé entre parenthèses si le jury a reçu des directives sur la croyance erronée au consentement.

[24] La présente directive ne mentionne pas l’infraction de voies de fait qui peut être incluse. Si les procureurs demandent qu’une telle directive soit donnée au jury, sachez que la définition de consentement pour l’infraction de voies de fait (art. 265(3) Code criminel) diffère de la définition de consentement pour l’infraction d’agression sexuelle (art. 273.1 Code criminel).