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Infraction 5(2) : Possession en vue du trafic

(Avril 2017)

[1]              (NDA) est accusé de possession de (préciser), une substance désignée[1] , en vue d’en faire le trafic. L’accusation se lit comme suit :

(Lire l’acte d’accusation ou le chef d’accusation)

[2]              Vous devez déclarer (NDA) non coupable de possession de (préciser) en vue d’en faire le trafic, à moins que la Couronne n’ait prouvé hors de tout doute raisonnable que (NDA) est la personne qui a commis l’infraction à la date et au lieu indiqués dans l’acte d’accusation[2] . De plus, la Couronne doit prouver chacun des éléments essentiels suivants hors de tout doute raisonnable :

1. La substance était une substance désignée, à savoir (inscrire la substance mentionnée dans l’acte d’accusation);

2. (NDA) était en possession de la substance[3] ;

3. (NDA) connaissait la nature de la substance;

4. (NDA) était en possession de la substance en vue d’en faire le trafic.

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que la Couronne a prouvé tous ces éléments essentiels, vous devez déclarer (NDA) non coupable de possession en vue du trafic.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que la Couronne a prouvé tous les éléments essentiels de l’infraction reprochée [et que vous n’entretenez aucun doute raisonnable après avoir examiné le ou les moyens de défense (préciser) sur lesquels je vous donnerai des directives,][4] vous devez déclarer (NDA) coupable de possession en vue du trafic.

Afin d’établir si la Couronne a prouvé les éléments essentiels de l’infraction reprochée, examinez les questions suivantes :

[3]              Première question – La substance était-elle une substance désignée, à savoir (inscrire la substance mentionnée dans l’acte d’accusation)?

Je vous dis que, en droit, le (la) (préciser la substance) est une substance désignée. Un certificat de l’analyste a été produit en tant que pièce (préciser le numéro). Ce certificat constitue la preuve que la substance analysée était de[du] (préciser).

Le libellé de cette directive suppose que l’analyse exposée dans le certificat n’est pas contestée. Si l’analyse est contestée ou si aucun certificat de l’analyste n’a été produit, examiner la preuve pertinente [souvent une admission de fait] et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que la substance était de[du] (préciser), vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que la substance était de[du] (préciser), vous devez passer à la prochaine question.

[4]              Deuxième question – (NDA) était-il en possession de la substance désignée?

Les présentes directives couvrent les trois modes de possession : personnelle, imputée et conjointe. Si la preuve ne révèle qu’un seul mode de possession, le juge du procès devrait la modifier en conséquence.

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) était en possession de la substance.

(Dans tous les cas :)

Une personne est en possession d’une substance si elle sait qu’elle en a physiquement la garde et le contrôle. Contrôle signifie que la personne a un certain pouvoir sur la substance, qu’elle l’ait exercé ou non.[5]

(Lorsqu’il existe une preuve de possession imputée :)

Une personne est aussi en possession d’une substance si, alors qu’elle exerce un certain contrôle sur celle-ci, elle met ou conserve sciemment la substance en la possession d’une autre personne ou dans un lieu pour son propre usage ou avantage ou celui d’une autre personne[6] .

(Lorsqu’il existe une preuve de possession conjointe :)

En outre, deux personnes ou plus peuvent être en possession de la même substance.

Lorsqu’une personne a une substance en sa possession, au su et avec le consentement des autres, chacune de celles qui exercent un certain contrôle sur la substance est en possession de la substance. Cependant, la simple indifférence ou le fait de ne rien faire ne vaut pas consentement.

Lorsque la Couronne invoque plus d’un mode de possession, donner la directive suivante au jury :

        La preuve de l’un ou l’autre de ces modes de possession suffit à établir que (NDA) était en possession de la substance. Il n’est pas nécessaire que vous soyez tous d’accord sur le même mode de possession. Si chacun d’entre vous est convaincu hors de tout doute raisonnable que l’un des modes de possession a été prouvé, la Couronne aura prouvé l’élément essentiel de la possession.

(Examiner la preuve pertinente et la relier à chacun des modes de possession révélés par la preuve)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) était en possession de la substance, vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) était en possession de la substance, vous devez passer à la prochaine question.

[5]              Troisième question – (NDA) connaissait-il la nature de la substance?

La connaissance sera établie si la Couronne prouve hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait que la substance était de[du] (inscrire la substance mentionnée dans l’acte d’accusation) ou croyait qu’il s’agissait d’une autre substance, dont le trafic est, en fait, interdit.

La Couronne n’a pas à prouver que (NDA) connaissait l’appellation technique de la substance.

Lorsqu’il existe une preuve selon laquelle l’accusé croyait que la substance dont il s’agissait était en fait une autre substance interdite, il y aura lieu de donner une directive du genre de celle qui suit[7]  :

        Vous avez entendu une preuve selon laquelle (NDA) croyait que la substance dont il s’agissait était de[du] (préciser) et non de[du] (inscrire la substance mentionnée dans l’acte d’accusation). Je vous dis que, en droit, le fait que (NDA) croyait que la substance dont il s’agissait était de[du] (préciser) n’a pas d’importance, puisque la possession de l’une ou l’autre substance en vue d’en faire le trafic constitue une infraction.

 

Lorsqu’il existe une preuve d’aveuglement volontaire, il y aurait lieu d’ajouter une directive du genre de celle qui suit :

        La connaissance est également établie si la Couronne a prouvé hors de tout doute raisonnable que (NDA) avait connaissance de signes indiquant la nature illégale de la substance, mais qu’il a délibérément choisi de les ignorer parce que (NDA) ne voulait pas connaître la vérité.

 

Lorsqu’il existe une preuve d’insouciance, il y aurait lieu d’ajouter une directive du genre de celle qui suit :[8]

        La connaissance est établie si la Couronne prouve hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait qu’il existait un risque que la substance était illégale, mais qu’il a décidé de courir le risque. [9]

 

Lorsque la Couronne allègue plus d’une preuve de connaissance, donner la directive suivante au jury :

L’une ou l’autre de ces preuves suffit à établir que (NDA) connaissait la nature de la substance. Il n’est pas nécessaire que vous soyez tous d’accord sur la même preuve. Si chacun d’entre vous est convaincu hors de tout doute raisonnable de l’une d’elles, la Couronne aura prouvé l’élément essentiel de la connaissance.

(Revoir la preuve établissant la connaissance que (NDA) avait de la nature de la substance, y compris toute preuve, notamment un témoignage d’expert, concernant le nom courant de la substance interdite.)

Lorsqu’il existe une preuve selon laquelle l’accusé croyait que la substance dont il s’agissait n’était pas une substance incluse dans les annexes I, II, III ou IV, il y aurait lieu d’ajouter une directive du genre de celle qui suit :

        (NDA) prétend qu’il ne savait pas que la substance dont il s’agissait était de[du] (inscrire la substance mentionnée dans l’acte d’accusation), et croyait sincèrement qu’il s’agissait plutôt de[du] (préciser), dont le trafic n’est pas interdit. La croyance de (NDA) doit être sincère, mais elle n’a pas à être raisonnable. Cependant, vous devez examiner s’il existe des fondements raisonnables qui sous-tendent la croyance de (NDA). La présence ou l’absence de fondements raisonnables peut vous aider à décider si la croyance de (NDA) était sincère.

(NDA) n’a pas à prouver qu’il croyait sincèrement que la substance dont il s’agissait était de[du] (préciser). C’est la Couronne qui doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) n’avait pas cette croyance.

Il vous appartient de décider si, compte tenu de l’ensemble de la preuve, vous êtes convaincus que la Couronne a prouvé hors de tout doute raisonnable que (NDA) connaissait la nature de la substance.

(Examiner la preuve pertinente et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

À moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) connaissait la nature de la substance, vous devez déclarer (NDA) non coupable. Cela mettra fin à vos délibérations.

Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable que (NDA) savait que la substance dont il s’agissait était de[du] (préciser), vous devez passer à la prochaine question.

[6]              Quatrième question – (NDA) était-il en possession de la substance (ou, préciser) en vue d’en faire le trafic?

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que (NDA) était en possession de la substance en vue d’en faire le trafic (ou préciser le moyen allégué par la Couronne).

On entend par « trafic » toute opération de vente, d’administration[10] , de don, de cession[11] , de transport[12] , d’expédition ou de livraison.

Afin de décider si (NDA) était en possession de la substance en vue d’en faire le trafic, vous devrez examiner l’ensemble de la preuve, y compris les paroles prononcées et les gestes posés dans les circonstances.

(Revoir la preuve pertinente, p. ex. la quantité, l’équipement, l’argent liquide, etc. et expliquer le lien entre cette preuve et la question en litige.)

Les directives qui suivent s’appliquent seulement si la substance désignée fait partie des substances inscrites aux annexes I, II ou III. Si la substance désignée indiquée dans l’acte d’accusation est inscrite à l’annexe IV, la simple possession n’est pas une infraction incluse, et les directives qui suivent devront être modifiées en conséquence. [13]

Lorsque vous aurez examiné l’ensemble de la preuve, vous pourrez rendre l’un des trois verdicts suivants :

      1. non coupable;

      2. coupable de possession en vue du trafic;

      3. non coupable de possession en vue du trafic, mais coupable de l’infraction incluse de possession.

Vous ne devez pas déclarer (NDA) coupable de quelque infraction que ce soit à moins d’être convaincus hors de tout doute raisonnable de chacun des éléments suivants :

      1. La substance était une substance désignée, à savoir (préciser);

      2. (NDA) était en possession de la substance;

      3. (NDA) connaissait la nature de la substance.

Si l’un de ces éléments essentiels n’a pas été prouvé hors de tout doute raisonnable [ou si vous entretenez un doute raisonnable à l’égard (préciser le ou les moyens de défense), votre verdict ne doit pas être la culpabilité.

Vous devez déclarer (NDA) coupable de possession en vue du trafic si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable de ce qui suit :

      1. La substance était une substance désignée, à savoir (préciser);

      2. (NDA) était en possession de la substance;

      3. (NDA) connaissait la nature de la substance;

      4. (NDA) était en possession de la substance en vue d’en faire le trafic.

Si vous entretenez un doute raisonnable sur la question de savoir si (NDA) était en possession de la substance en vue d’en faire le trafic, mais que vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable de tous les autres éléments essentiels de l’infraction reprochée, vous devez déclarer (NDA) non coupable de possession en vue du trafic, mais coupable de possession.

 

[1] On trouve la définition détaillée du terme « substance » à l’article 2(2) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Prendre note que la définition de substance désignée qu’on trouve dans la Loi vise les substances inscrites aux annexes I, II, III, IV et V. Cependant, la possession simple n’est interdite qu’à l’égard des substances inscrites aux annexes I, II et III. Le trafic et la possession en vue de faire le trafic ne sont interdits qu’à l’égard des substances inscrites aux annexes I, II, III et IV. Voir les articles 4(1), 5(1) et 5(2).

[2] Lorsque l’identité de l’accusé est en litige, ne pas oublier d’inclure les autres directives susceptibles de s’appliquer (p. ex., identification par témoin oculaire, alibi, faits similaires). Lorsque la date est en litige, informer le jury que la Couronne doit prouver que l’infraction a eu lieu à l’intérieur des dates indiquées dans l’acte d’accusation. Lorsque le lieu est en litige, informer le jury que la Couronne doit prouver que l’infraction a été commise en partie au lieu indiqué dans l’acte d’accusation.

En règle générale, la Couronne doit prouver la date et le lieu indiqués dans l’acte d’accusation. Cependant, s’il y a divergence entre la preuve et l’acte d’accusation, se reporter à l’art. 601(4.1) du Code criminel et la jurisprudence qui a suivi l’arrêt R. c. B. (G.), [1990] 2 RCS 3.

[3] L’article 2 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, L.C. 1996, ch. 19, précise que « possession » s’entend au sens du Code criminel du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-46.

On trouve la définition suivante du terme « possession » paragraphe 4(3) du Code criminel :

(3) Pour l’application de la présente loi :

a) une personne est en possession d’une chose lorsqu’elle l’a en sa possession personnelle ou que, sciemment :

(i) ou bien elle l’a en la possession ou garde réelle d’une autre personne,

(ii) ou bien elle l’a en un lieu qui lui appartient ou non ou qu’elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d’une autre personne;

                (b) lorsqu’une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l’autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d’elles.

                Dans R. c. Pham, [2005] O.J. No. 5127 (C.A.) au par. 14 (jugement confirmé par la Cour suprême, [2006] 1 RCS 940, 2006 CSC 26), la Cour d’appel de l’Ontario a interprété cet article comme créant trois modes de possession :

a) la possession personnelle, au sens de l’alinéa 4(3)(a);

b) la possession imputée au sens des alinéas 4(3)(a)(i) et 4(3)(a)(ii);

c) la possession conjointe au sens de l’alinéa 4(3)(b).

[4] Insérer les mots figurant entre parenthèses carrées lorsqu’ils conviennent à la situation. Cette directive devra être modifiée lorsque l’accusé présente un moyen de défense général à l’égard duquel il a le fardeau légal de preuve, par exemple la défense de troubles mentaux, d’intoxication extrême ou d’automatisme.

[5] R. c. Beaver, [1957] R.C.S 531; R. c. Terrence, [1983] 1 RCS 357; R. c. Morelli, [2010] 1 RCS 253; R. c. Pham, 2006 CSC 26, [2006] 1 RCS 940, confirmant (2005), 203 CCC (3d) 326 (ONCA).

[6] Voir R. c. Pham, 2006 CSC 26, [2006] 1 RCS 940, confirmant (2005), 203 CCC (3d) 326 (ONCA), et R. c. Morelli, [2010] 1 RCS 253, au par. 17.

[7] Lorsque la substance fait partie des substances interdites par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (p. ex. l’héroïne), le fait que l’accusé croyait qu’il s’agissait d’une autre substance n’a aucune importance, pourvu que celle-ci soit une substance dont le trafic est interdit (p. ex. la cocaïne) aux termes de la Loi. Voir R. c. Kundeus, [1976] 2 RCS 272, R. c. Williams, 2009 ONCA 342, [2009] O.J. 1692, au par. 19.

[8] Avant 1989, il semblait clair qu’il était possible d’établir l’élément de connaissance dans les affaires de drogue au moyen de l’insouciance ou de l’aveuglement volontaire. La Cour suprême du Canada a confirmé une décision de la Cour d’appel de l’Ontario concernant une accusation de possession dans le but de faire le trafic dans laquelle le juge Martin tenait les propos suivants :

                In our view, the trial judge should have directed the jury that if they were satisfied beyond a reasonable doubt that the respondent assumed control of the package, knowing that it contained a drug, the trafficking in which was prohibited, or was wilfully blind to it being such a drug or was reckless as to whether it was such a prohibited drug, then the knowledge necessary to constitute the offence was established.

R. c. Aiello, [1978] O.J. No. 373 (C.A.), au par. 488; confirmé par la Cour suprême du Canada, [1979] 2 R.C.S. 15.

Toutefois, en 1989, dans R. c. Sandhu, [1989] O.J. No. 1647, la Cour d’appel de l’Ontario a déclaré que la connaissance aux fins de l’infraction d’importation peut couvrir un spectre allant de la connaissance réelle à l’aveuglement volontaire, mais non pas à l’insouciance.

Depuis, deux cours d’appel ont déclaré que la connaissance peut être établie soit en prouvant l’aveuglement volontaire, soit en prouvant l’insouciance. Voir R. c. Oluwa, [1996] B.C.J. No. 1065 (C.A.); R. c. Vu, 2004 BCCA 381, [2004] B.C.J. No. 1387, et R. c. Rathod, 1993 CanLII 4119 (C.A.Q.).

La Cour suprême du Canada a de nouveau affirmé dans R. c. Briscoe, [2010] 1 RCS 411 que, de manière générale, l’insouciance est un état d’esprit suffisant en ce qui concerne les infractions criminelles.

[9] Dans Sansregret c. La Reine, [1985] SCJ No 23, (1985), 18 C.C.C. (3d) 223, au par. 22, la Cour suprême du Canada explique la différence entre la l’insouciance et l’aveuglement volontaire :

                L'ignorance volontaire diffère de l'insouciance parce que, alors que l'insouciance comporte la connaissance d'un danger ou d'un risque et la persistance dans une conduite qui engendre le risque que le résultat prohibé se produise, l'ignorance volontaire se produit lorsqu'une personne qui a ressenti le besoin de se renseigner refuse de le faire parce qu'elle ne veut pas connaître la vérité. Elle préfère rester dans l'ignorance. La culpabilité dans le cas d'insouciance se justifie par la prise de conscience du risque et par le fait d'agir malgré celuiā€‘ci, alors que dans le cas de l'ignorance volontaire elle se justifie par la faute que commet l'accusé en omettant délibérément de se renseigner lorsqu'il sait qu'il y a des motifs de le faire.

[10] Voir R. c. Eccleston and Gianiori, [1975] B.C.J. No. 1062; R. c. Tan, [1984], S.J. No. 689; et R. c. Rousseau (1992), 70 C.C.C. (3d) 445, [1991] J.Q. n° 1911.

[11] R. c. Grant, 2009 CSC 32, par. 141-147.

[12] Idem.

[13] Voir la note 1.