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Remarque : les modèles de directives au jury sont des gabarits que les juges doivent adapter aux circonstances particulières de chaque procès, et non pas simplement lire dans leur intégralité. Elles ne sont pas conçues pour être présentées « telles quelles ». On trouvera de plus amples renseignements sur l’utilisation des modèles de directives au jury dans la préface et l’avis aux utilisateurs, qu’on peut consulter ici.

11.27 L’exception au ouï-dire relative aux coconspirateurs et à la réalisation d’un projet commun

(dernière mise à jour – juin 2012)

[1]              Une partie de la preuve que vous avez entendue incluait des déclarations extrajudiciaires faites par : (NDA1), (NDA2), autres présumés coconspirateurs, autres présumés coconspirateurs n’ayant pas été accusés ou d’autres participants à la réalisation du projet commun. Deux règles générales s’appliquent aux déclarations extrajudiciaires.

[2]              Ces deux règles générales sont les suivantes :

1.    la déclaration extrajudiciaire d’une autre personne que l’accusé n’est pas une preuve de ce qui s’est produit;
2.    la déclaration extrajudiciaire d’un accusé ne peut servir comme preuve qu’à l’égard de l’accusé qui a fait la déclaration.

[3]              Je vais maintenant vous expliquer une exception qui peut s’appliquer à certaines déclarations extrajudiciaires que vous avez entendues pendant le procès.

S’il s’agit d’une accusation de complot, utiliser les paragraphes [4] – [8].

S’il s’agit d’une accusation de réalisation d’un projet commun, utiliser les paragraphes [9] – [13].

Complot

[4]              Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu complot en vue de (préciser la fin illégale), vous pouvez décider de tenir compte des déclarations extrajudiciaires faites dans la poursuite du complot par toute personne qui en était probablement membre, relativement à tout accusé qui en était aussi probablement membre.

[5]              Cependant, vous devez arriver à cette décision en trois étapes :

[6]              Premièrement, vous devez décider si la Couronne a prouvé hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu complot entre (les dates indiquées dans l’acte d’accusation) en vue de (préciser la fin illégale). Examinez cette question en tenant compte de toute la preuve que vous avez entendue[1] . À cette étape, vous devez uniquement déterminer s’il y a eu un tel complot, et non déterminer qui en était membre.

(Revoir la preuve liée à l’existence d’un complot.)

[7]              Deuxièmement, si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu complot en vue de (préciser la fin illégale), vous devez décider si (préciser le nom de l’auteur des actes ou déclarations et de la personne à l’encontre de laquelle ils servent de preuve) en étaient probablement membres. Examinez le cas de chaque personne individuellement. Vous devez décider s’il est plus probable que moins probable que cette personne a participé au complot. À moins que je ne vous donne d’autres directives[2] , pour décider si une personne a probablement participé au complot, tenez compte uniquement de ses actes et déclarations dans le contexte où ils se sont produits. À cette étape-ci, vous pouvez tenir compte des actes ou déclarations d’un participant présumé au complot, mais uniquement en rapport avec la participation de cette personne, et non celle d’aucune autre personne.

C’est à vous qu’il revient de décider si les déclarations ont été faites, ou si les actes ont été posés, et ce qu’ils signifiaient.

(Revoir la preuve directement admissible à l’égard de chaque personne concernant sa participation au complot.)

[8]              Troisièmement, si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu complot en vue de (préciser la fin illégale), et que vous avez déterminé quelles personnes y ont probablement participé, vous pouvez alors tenir compte des déclarations extrajudiciaires faites par tout membre probable à l’égard de tout autre membre probable, mais uniquement celles faites dans la poursuite du complot. Il doit donc s’agir de déclarations faites dans le but de faire avancer ou d’accomplir (préciser la fin illégale) pendant que le complot était en cours et que l’auteur de la déclaration y participait.

C’est à vous qu’il revient de décider si les déclarations ont été faites et ce qu’elles signifiaient.

Ajouter la mention suivante au besoin :

« Les déclarations faites par (NDA1) ou (NDA2) ou tout présumé coconspirateur à la police après qu’il a cessé de participer au complot ne peuvent servir à établir la culpabilité d’aucune autre personne que celle qui a fait la déclaration. »

Donner des directives restrictives similaires à l’égard de toute autre déclaration n’ayant pas clairement été faite dans la poursuite du complot, sans oublier toutefois que la question de savoir si la déclaration a été faite « dans la poursuite » du complot est une question de fait relevant du jury.

 

Ajouter la directive suivante si un chef de complot est ajouté à une accusation substantielle qui ne comporte pas la réalisation d’un projet commun :

Les règles spéciales que je viens de vous expliquer ne s’appliquent qu’à l’accusation de complot. Les règles générales dont j’ai parlé auparavant s’appliquent à l’accusation de (préciser).

Réalisation d’un projet commun

[9]              Si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable[3]   qu’il y a eu un projet commun en vue de (préciser la fin illégale), vous pouvez décider de tenir compte des déclarations extrajudiciaires faites dans la poursuite du projet commun par toute personne qui était probablement un participant, relativement à tout accusé qui était aussi probablement un participant.

[10]           Cependant, vous devez arriver à cette décision en trois étapes:

[11]           Premièrement, vous devez décider si la Couronne a prouvé hors de tout doute raisonnable qu’il y avait projet commun en vue de (préciser la fin illégale). Examinez cette question en tenant compte de toute la preuve que vous avez entendue[4] . À cette étape, vous devez uniquement déterminer s’il y a eu projet commun et non déterminer qui en étaient les participants.

[12]           Deuxièmement, si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu projet commun de (préciser la fin illégale), vous devez décider si (préciser le nom de l’auteur des actes ou déclarations et de la personne à l’encontre de laquelle ils servent de preuve) étaient probablement des participants. Examinez le cas de chaque personne individuellement. Vous devez décider s’il est plus probable que moins probable que cette personne a participé au projet commun. À moins que je ne vous donne d’autres directives[5] , pour déterminer si une personne était probablement un participant, tenez compte uniquement de ses propres actes et déclarations dans le contexte où ils se sont produits. À cette étape-ci, vous pouvez utiliser les actes ou déclarations d’un participant présumé au projet commun, mais uniquement en rapport avec la participation de cette personne, et non celle d’aucune autre personne.

C’est à vous qu’il revient de décider si les déclarations ont été faites, ou si les actes ont été posés, et ce qu’ils signifiaient.

(Revoir la preuve directement admissible à l’égard de chaque personne concernant sa participation au projet commun.)

[13]           Troisièmement, si vous êtes convaincus hors de tout doute raisonnable qu’il y a eu projet commun en vue de (préciser la fin illégale), et que vous avez déterminé quelles personnes y ont probablement participé, vous pouvez alors tenir compte des déclarations extrajudiciaires faites par tout participant probable à l’égard de tout autre participant probable, mais uniquement les déclarations faites dans la poursuite du projet commun. Il doit donc s’agir de déclarations faites dans le but de faire avancer ou d’accomplir (préciser la fin illégale) pendant que le projet commun était en cours et que l’auteur de la déclaration y participait.

Ajouter la mention suivante au besoin :

Les déclarations faites par (NDA1) ou (NDA2) ou tout participant présumé à la police après qu’il a cessé de participer au projet commun ne peuvent servir à établir la culpabilité d’aucune autre personne que celle qui a fait la déclaration.

Ajouter des directives restrictives similaires relativement à toute autre déclaration n’ayant clairement pas été faite dans le contexte du projet commun, sans oublier toutefois que la question de savoir si la déclaration a été faite « dans la poursuite » du projet commun est une question de fait relevant du jury.

 

Ajouter la directive suivante si un chef de projet commun est ajouté à une accusation d’infraction substantielle qui ne comprend pas la réalisation d’un projet commun:

Les règles spéciales que je viens de vous expliquer ne s’appliquent qu’à l’accusation de (préciser l’infraction incluant le projet commun). Les règles générales dont je vous ai parlé auparavant s’appliquent à l’accusation de (préciser).

[1] Il y a deux écoles de pensée sur la question de la preuve qui peut être prise en considération à la première étape. Selon certains, le jury peut tenir compte non seulement de la preuve admissible en vertu des règles ordinaires, mais aussi des déclarations faites dans la poursuite du but commun par des membres présumés de celui-ci qui sont admissibles de façon provisoire en vertu de l’exception à la règle du ouï-dire applicable aux coconspirateurs. Selon d’autres, seule la preuve admissible selon les règles ordinaires est admissible à la première étape. Pour un survol de la jurisprudence, voir R. c. Smith (2007) 216 C.C.C. (3d) (C.A. N.-É.), aux par. 225-239.

[2] Dans certains cas, il pourrait y avoir d’autres éléments de preuve directement admissibles pour établir qu’une personne était probablement membre du complot : p.ex., une preuve qui n’est pas du ouï-dire ou une preuve admissible en vertu d’autres exceptions au ouï-dire ou en vertu des règles fondées sur les principes. Dans ce cas-ci, cette preuve devrait être incluse dans la revue de la preuve directement admissible contre chaque membre du complot.

[3] Cette directive est fondée sur l’hypothèse selon laquelle la norme de preuve de la première étape selon R. c. Carter, [1982] 1 R.C.S. 938, 67 C.C.C. (2d) 568 (preuve hors de tout doute raisonnable) s’applique lorsque l’admissibilité est fondée sur l’existence d’un projet commun : voir R. c. Koufis, [1941] R.C.S. 481, 76 C.C.C. 161 et R. c. Sutton, [2000] 2 R.C.S. 595, 148 C.C.C. (3d) 613, au par. 8.  Les cours d’appel du Nouveau-Brunswick, de la Colombie-Britannique et du Québec ont déclaré que la norme de preuve de l’existence du projet commun à la première étape est celle de la preuve prépondérante; en conséquence, les paragraphes [9] et [11] de la présente directive devraient être adaptés dans ces provinces : R. c. Sutton (1999), 140 C.C.C. (3d) 336 (C.A. N.-B.); R. c. Lambert, 2007 BCCA 26; R. c. Sebbag, [2004] JQ no. 7397 (C.A.Q.). Il n’existe pas d’arrêt de la Cour suprême du Canada confirmant cette distinction entre les cas de complot et de projet commun relativement à l’admissibilité du ouï-dire, ni de jurisprudence traitant spécifiquement de la norme de preuve dans les cas où l’acte d’accusation comprend à la fois un chef de complot et un chef relatif l’infraction substantielle.

[4] Il y a deux écoles de pensée sur la question de la preuve qui peut être prise en considération à la première étape dans les cas d’accusation de complot. Ce débat peut être pertinent dans les cas comportant la réalisation d’un projet commun. Voir la note 73.

[5] Dans certains cas, il pourrait y avoir d’autres éléments de preuve directement admissibles afin d’établir qu’une personne était probablement un participant au projet commun : p.ex., une preuve qui n’est pas du ouï-dire ou une preuve admissible en vertu d’autres exceptions au ouï-dire ou en vertu des règles fondées sur les principes. Dans ce cas, cette preuve devrait être incluse dans la revue de la preuve directement admissible contre chaque participant au projet commun.